La condition des femmes
extrait de Paysage Maure de Paule Valette, édition Terre du Ciel

Ouvrir ce chapitre sur la femme c’est, à ne pas en douter, prendre le risque de rencontrer en face de soi les préjugés les plus répandus, résumés en une phrase péremptoire et sans nuance : l’islam asservit la femme. Or, je rencontre en Mauritanie bien autant de femmes épanouies qu’en France.
Peut-être parce que, très réalistes, les premières ne demandent pas à un homme d’être à la fois le compagnon, l’ami, le parent, l’enfant, l’amant, le mari, etc., et qu’elles ont l’art de tirer parti de ce qu’elles ont, et qui, à bien y regarder, est une
grande liberté, si on ne laisse pas prendre au verbe masculin et à l’envol des boubous bruissants. Il me semble même que la société mauritanienne en soit à une phase matriarcale de son évolution. J’oserai dire que cette société se "ressent", s’appréhende elle- même de cette manière dans des faits en apparence anodins.
On a le sentiment que la femme est partout présente, elle a son propre ministère de la condition féminine ; des femmes exercent les fonctions de ministre, professeurs ou directeurs d’établissements. Les festivités mêmes semblent réservées à leur usage, non à celui des hommes.
Le baptême, par exemple, est un moment féminin par excellence et les deux tiers des cérémonies du mariage sont vécues seulement entre femmes ; les hommes n'y participent que pour les nuits de noces. Il est d’ailleurs un fait avéré que rien dans le quotidien de la vie ne rapproche les conjoints. La séparation des sexes est totale, chacun vivant avec ses semblables, les hommes entre eux, les femmes entre elles ; on se retrouve pour passer la nuit ensemble. Les femmes mauritaniennes sont très libres de leurs allées et venues et se réunissent quand elles le désirent pour d’interminables papotages autour du thé. Dans la vie quotidienne, si une jeune femme veut se rendre à un mariage et que son propre mari ne connait pas le marié ou qu’il soit plus jeune que cet homme, le mari ne pourra pas - socialement parlant - accompagner sa femme à la cérémonie. Il n’est pas concerné et, pour des raisons de convenance, de code social, devra rester à la maison. Sa femme se rendra seule à la fête.
A l’inverse, si c’est un ami du mari dont on célèbre les noces, quel que soit son âge, même si le futur marié et son épouse lui sont totalement inconnus, la jeune femme peut sans problème accompagner son mari. La société admet parfaitement qu’une femme sorte pour se distraire sans la présence de son mari, elle n’admet pas en revanche qu’un homme puisse sortir sans sa femme.
De la même manière, une femme peut dire à son mari : "c’est les vacances, je voudrais que tu achètes des billets d’avion. Je veux partir avec les enfants." Le mari obtempère même si lui ne part pas, retenu par ses obligations professionnelles. La femme voyage seule et ce n’est un problème pour aucun des deux.
Par contre, l’inverse est impossible. Un homme ne peut pas dire : "Je suis fatigué, j’ai envie de prendre quelques jours tout seul". Ou il doit renoncer à partir ou il doit emmener sa femme. Le poids des us et coutumes est important, c’est ainsi : un homme ne voyage pas seul pour se distraire.
Bien sûr, un coup d’œil superficiel porté sur le salon qui bruit peut faire penser à une ségrégation des femmes ; il n’en est rien, c’est une ruche bourdonnante où chacune s’exprime, les conversations y sont - très - libres et les confrontations d’expériences ponctuées de fous rires ; on ne se sent pas là au milieu de personnes muselées ou réduites à l’état d’objet.
Au fond, la Mauritanienne n’a pas du couple qu’elle forme avec son mari une image fusionnelle mais se montre d’un grand pragmatisme, et l’on pourrait parler sans jouer la provocation non pas des droits de la femme mais bien, ici, me semble- t’il, de ceux de l’homme ! Car à l’intérieur de la maison, il ne semble pas en avoir beaucoup et sa propre épouse ne paraît guère s’occuper de lui. A cause de ce fameux code culturel, elle ne doit rien laisser paraître en public des sentiments positifs qu’elle peut éprouver. Le dédain, la désinvolture, oui. Il rentre las de son travail, accablé de soucis et responsabilités ? Il faut jouer le détachement, ne pas voir sa fatigue, appeler pour qu’on lui apporte de quoi se rafraîchir : Zrig !
Lorsqu’on annonce à une vieille femme que telle jeune fille va se marier, la première demande inquiète soudain : "Elle n’est pas amoureuse, au moins ?", ce qui signifie non pas qu’elle souhaite une totale absence de sentiments mais qu’il serait un rien vulgaire de dévoiler lesdits sentiments en se montrant empressée ; une telle attitude serait très mal perçue.
L’affection, l’attachement, l’homme a le devoir de les démontrer, la femme non, elle doit seulement se laisser courtiser. "Un homme, c’est un animal que vous tenez en laisse", me dit cette belle jeune femme sûre de son pouvoir.
Depuis toujours le discours des mères à leurs filles est identique et a induit un comportement qu’on pourrait taxer de léger, voire de capricieux : "Un homme est un ornement pour la femme : il vous plaît, il est beau, il vous convient ? gardez- le ; le jour où il devient sale à vos yeux, jetez- le."
D’autres témoignages sont moins catégoriques et toute une gamme de comportements existe en Mauritanie aussi. Certes, dans certains couples, la femme n’a toujours pas droit à la parole. Mais dans le même temps, des hommes et leurs épouses ont fait de l’alternance des responsabilités et de l’appui mutuel leur objectif. Généralement, l’homme n’a pas le droit d’élever la voix chez lui, car s’il lui arrive de parler trop fort, sa femme peut le quitter immédiatement et retourner dans sa famille. Elle peut d’ailleurs menacer de partir pour un prétexte futile : obtenir un cadeau, par exemple - car la femme mauritanienne semble un peu... intéressée. Suivant les moyens matériels de l’homme, cela peut n’être qu’un simple bijou, mais parfois c’est une maison ou une voiture, moyen de chantage, bien sûr, mais façon de voir si elle tient toujours la situation en main ; le mari se doit de répondre positivement s’il veut conserver son épouse.
Et si, malgré tout, la femme part dans sa famille, alors son mari doit la suivre, gardant ainsi une infime chance que la brouille ne dégénère pas davantage. Si elle part et qu’il ne la suive pas, tout est rompu ; cela devient un scandale et le divorce est systématique. "Rendez- nous le cou de notre fille ", dit- on au gendre par allusion à l’animal retenu au moyen d’une corde attachée à l’encolure. Si le mari, lui, ne veut pas divorcer, on se moque : " Elle ne l’aime plus, il s’accroche, ce n’est même pas un homme ", et si, divorcé, il omet de donner l’argent nécessaire à l’entretien de ses enfants, alors il signe son arrêt de mort sociale ; plus aucune famille ne voudra qu’il courtise sa propre fille, car ce qu’il a fait à l’une - démonstration de sa pingrerie - il peut le faire à une autre : s’abstenir. Les femmes veulent de l’argent pour elles et pour leur propre famille.
On divorce beaucoup en Mauritanie et c’est très souvent la femme qui demande et obtient satisfaction sans problème. Ces divorces successifs sont d’ailleurs la signature de son charme. Plus elle se marie, plus la preuve de sa séduction est irréfutable. Elle est indomptable.
Depuis leur enfance, les petites filles entendent un discours formateur : "Essayez toujours de tout arranger avec votre mari". Il vaut mieux, en effet, que la famille soit tenue à l’écart de certaines choses qu’elle ne supporterait pas et qui amènerait l’irrémédiable." Mais il y a trois faits que vous ne devez supporter sous aucun prétexte :
- "Votre mari vous parle sur un ton autre que celui de la courtoisie et commence, par exemple, à remarquer un grain de beauté mal placé ou votre nez un peu trop droit (ou trop épaté). S’il ne vous voit plus avec les mêmes yeux c’est qu’il veut se séparer. Ne pas insister !"
- L’argent - la femme mauritanienne en a toujours besoin : "Il a de l’argent. Il ne vous en donne pas assez ! Inutile de rester avec lui."
- "Il vous trompe ? Faites tout pour qu’il ne le fasse pas, mais s’il le fait, pliez bagage et partez. S’il vous a trompée une fois, il recommencera."
Le seul point auquel la femme ne puisse rien opposer est le divorce exigé par le mari, et qui peut arriver sans crier gare. Il lui annonce "qu’il la divorce" ; encore mariée le matin, à midi elle peut être divorcée puisque la procédure est réduite au minimum : une lettre. L’islam recommande par contre de ne pas divorcer d’une femme avant le retour de couches. L’homme peut parfaitement divorcer et se remarier au cours de la même semaine. La femme, elle, ne pourra convoler à nouveau qu’après l’expiration du délai de viduité de trois mois.
Peut-être parce que, très réalistes, les premières ne demandent pas à un homme d’être à la fois le compagnon, l’ami, le parent, l’enfant, l’amant, le mari, etc., et qu’elles ont l’art de tirer parti de ce qu’elles ont, et qui, à bien y regarder, est une
grande liberté, si on ne laisse pas prendre au verbe masculin et à l’envol des boubous bruissants. Il me semble même que la société mauritanienne en soit à une phase matriarcale de son évolution. J’oserai dire que cette société se "ressent", s’appréhende elle- même de cette manière dans des faits en apparence anodins.
On a le sentiment que la femme est partout présente, elle a son propre ministère de la condition féminine ; des femmes exercent les fonctions de ministre, professeurs ou directeurs d’établissements. Les festivités mêmes semblent réservées à leur usage, non à celui des hommes.
Le baptême, par exemple, est un moment féminin par excellence et les deux tiers des cérémonies du mariage sont vécues seulement entre femmes ; les hommes n'y participent que pour les nuits de noces. Il est d’ailleurs un fait avéré que rien dans le quotidien de la vie ne rapproche les conjoints. La séparation des sexes est totale, chacun vivant avec ses semblables, les hommes entre eux, les femmes entre elles ; on se retrouve pour passer la nuit ensemble. Les femmes mauritaniennes sont très libres de leurs allées et venues et se réunissent quand elles le désirent pour d’interminables papotages autour du thé. Dans la vie quotidienne, si une jeune femme veut se rendre à un mariage et que son propre mari ne connait pas le marié ou qu’il soit plus jeune que cet homme, le mari ne pourra pas - socialement parlant - accompagner sa femme à la cérémonie. Il n’est pas concerné et, pour des raisons de convenance, de code social, devra rester à la maison. Sa femme se rendra seule à la fête.
A l’inverse, si c’est un ami du mari dont on célèbre les noces, quel que soit son âge, même si le futur marié et son épouse lui sont totalement inconnus, la jeune femme peut sans problème accompagner son mari. La société admet parfaitement qu’une femme sorte pour se distraire sans la présence de son mari, elle n’admet pas en revanche qu’un homme puisse sortir sans sa femme.
De la même manière, une femme peut dire à son mari : "c’est les vacances, je voudrais que tu achètes des billets d’avion. Je veux partir avec les enfants." Le mari obtempère même si lui ne part pas, retenu par ses obligations professionnelles. La femme voyage seule et ce n’est un problème pour aucun des deux.
Par contre, l’inverse est impossible. Un homme ne peut pas dire : "Je suis fatigué, j’ai envie de prendre quelques jours tout seul". Ou il doit renoncer à partir ou il doit emmener sa femme. Le poids des us et coutumes est important, c’est ainsi : un homme ne voyage pas seul pour se distraire.
Bien sûr, un coup d’œil superficiel porté sur le salon qui bruit peut faire penser à une ségrégation des femmes ; il n’en est rien, c’est une ruche bourdonnante où chacune s’exprime, les conversations y sont - très - libres et les confrontations d’expériences ponctuées de fous rires ; on ne se sent pas là au milieu de personnes muselées ou réduites à l’état d’objet.
Au fond, la Mauritanienne n’a pas du couple qu’elle forme avec son mari une image fusionnelle mais se montre d’un grand pragmatisme, et l’on pourrait parler sans jouer la provocation non pas des droits de la femme mais bien, ici, me semble- t’il, de ceux de l’homme ! Car à l’intérieur de la maison, il ne semble pas en avoir beaucoup et sa propre épouse ne paraît guère s’occuper de lui. A cause de ce fameux code culturel, elle ne doit rien laisser paraître en public des sentiments positifs qu’elle peut éprouver. Le dédain, la désinvolture, oui. Il rentre las de son travail, accablé de soucis et responsabilités ? Il faut jouer le détachement, ne pas voir sa fatigue, appeler pour qu’on lui apporte de quoi se rafraîchir : Zrig !
Lorsqu’on annonce à une vieille femme que telle jeune fille va se marier, la première demande inquiète soudain : "Elle n’est pas amoureuse, au moins ?", ce qui signifie non pas qu’elle souhaite une totale absence de sentiments mais qu’il serait un rien vulgaire de dévoiler lesdits sentiments en se montrant empressée ; une telle attitude serait très mal perçue.
L’affection, l’attachement, l’homme a le devoir de les démontrer, la femme non, elle doit seulement se laisser courtiser. "Un homme, c’est un animal que vous tenez en laisse", me dit cette belle jeune femme sûre de son pouvoir.
Depuis toujours le discours des mères à leurs filles est identique et a induit un comportement qu’on pourrait taxer de léger, voire de capricieux : "Un homme est un ornement pour la femme : il vous plaît, il est beau, il vous convient ? gardez- le ; le jour où il devient sale à vos yeux, jetez- le."
D’autres témoignages sont moins catégoriques et toute une gamme de comportements existe en Mauritanie aussi. Certes, dans certains couples, la femme n’a toujours pas droit à la parole. Mais dans le même temps, des hommes et leurs épouses ont fait de l’alternance des responsabilités et de l’appui mutuel leur objectif. Généralement, l’homme n’a pas le droit d’élever la voix chez lui, car s’il lui arrive de parler trop fort, sa femme peut le quitter immédiatement et retourner dans sa famille. Elle peut d’ailleurs menacer de partir pour un prétexte futile : obtenir un cadeau, par exemple - car la femme mauritanienne semble un peu... intéressée. Suivant les moyens matériels de l’homme, cela peut n’être qu’un simple bijou, mais parfois c’est une maison ou une voiture, moyen de chantage, bien sûr, mais façon de voir si elle tient toujours la situation en main ; le mari se doit de répondre positivement s’il veut conserver son épouse.
Et si, malgré tout, la femme part dans sa famille, alors son mari doit la suivre, gardant ainsi une infime chance que la brouille ne dégénère pas davantage. Si elle part et qu’il ne la suive pas, tout est rompu ; cela devient un scandale et le divorce est systématique. "Rendez- nous le cou de notre fille ", dit- on au gendre par allusion à l’animal retenu au moyen d’une corde attachée à l’encolure. Si le mari, lui, ne veut pas divorcer, on se moque : " Elle ne l’aime plus, il s’accroche, ce n’est même pas un homme ", et si, divorcé, il omet de donner l’argent nécessaire à l’entretien de ses enfants, alors il signe son arrêt de mort sociale ; plus aucune famille ne voudra qu’il courtise sa propre fille, car ce qu’il a fait à l’une - démonstration de sa pingrerie - il peut le faire à une autre : s’abstenir. Les femmes veulent de l’argent pour elles et pour leur propre famille.
On divorce beaucoup en Mauritanie et c’est très souvent la femme qui demande et obtient satisfaction sans problème. Ces divorces successifs sont d’ailleurs la signature de son charme. Plus elle se marie, plus la preuve de sa séduction est irréfutable. Elle est indomptable.
Depuis leur enfance, les petites filles entendent un discours formateur : "Essayez toujours de tout arranger avec votre mari". Il vaut mieux, en effet, que la famille soit tenue à l’écart de certaines choses qu’elle ne supporterait pas et qui amènerait l’irrémédiable." Mais il y a trois faits que vous ne devez supporter sous aucun prétexte :
- "Votre mari vous parle sur un ton autre que celui de la courtoisie et commence, par exemple, à remarquer un grain de beauté mal placé ou votre nez un peu trop droit (ou trop épaté). S’il ne vous voit plus avec les mêmes yeux c’est qu’il veut se séparer. Ne pas insister !"
- L’argent - la femme mauritanienne en a toujours besoin : "Il a de l’argent. Il ne vous en donne pas assez ! Inutile de rester avec lui."
- "Il vous trompe ? Faites tout pour qu’il ne le fasse pas, mais s’il le fait, pliez bagage et partez. S’il vous a trompée une fois, il recommencera."
Le seul point auquel la femme ne puisse rien opposer est le divorce exigé par le mari, et qui peut arriver sans crier gare. Il lui annonce "qu’il la divorce" ; encore mariée le matin, à midi elle peut être divorcée puisque la procédure est réduite au minimum : une lettre. L’islam recommande par contre de ne pas divorcer d’une femme avant le retour de couches. L’homme peut parfaitement divorcer et se remarier au cours de la même semaine. La femme, elle, ne pourra convoler à nouveau qu’après l’expiration du délai de viduité de trois mois.
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